Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Comme Néron sous l'Antiquité, avec les premiers martyrs chrétiens, les séides du président iranien Ahmadinejad veulent contraindre un pasteur à renier sa foi pour échapper à la peine de mort.

Youcef Nadarkhani, 34 ans, deux enfants, était pasteur depuis dix ans, dans la région de Gilan, à 250 kilomètres de Téhéran. Jusqu'en 2009, cet homme de Dieu, appartenant à l'Église évangélique, exerçait à peu près librement son ministère dans ce pays de 68 millions d'habitants, dont 99 % de la population est musulmane. 300 000 chrétiens vivent pourtant en Iran, dont beaucoup d'Arméniens et quelques milliers d'Iraniens de souche, comme le pasteur Nadarkhani. C'est bien là où le bât blesse.

Youcef-Nadarkhani-esposa-Iran.jpg

En 2009, le gouvernement iranien décide que tous les élèves scolarisés doivent suivre l'enseignement coranique. Y compris les enfants des familles chrétiennes. Youcef Nadarkhani se rend alors à l'école de la ville de Rasht où étaient scolarisés ses fils Daniel, neuf ans, et Yoel, sept ans, pour les en retirer en se basant sur la Constitution de la République islamique iranienne de 1979 qui reconnaît la liberté de culte à toutes les religions du Livre. Et donc aux chrétiens. En théorie du moins. Car le pasteur est arrêté le soir même par la police secrète. Il comparaît une première fois le 12 octobre 2009 devant une sorte de tribunal mi-politique, mi-confessionnel. On l'accuse d'apostasie. On lui reproche, à lui qui est chrétien, d'avoir abjuré l'islam.

Mobilisation internationale

Emprisonné dans la ville de Lakan, placé en cellule d'isolement pendant de longs mois, Nadarkhani est sommé de revenir à la religion du Prophète sous peine de mort, car en Iran l'apostasie est un crime puni de la peine capitale. Le pasteur a beau expliquer qu'il n'a rien renié, puisqu'il n'a jamais été musulman de sa vie, on cherche par tous les moyens à le faire plier. Y compris en lui administrant des sédatifs à haute dose pour casser sa volonté. Faute d'y parvenir, on s'attaque à sa famille. Sa femme est arrêtée, jugée sommairement, sans même l'assistance d'un avocat, et condamnée à la prison à vie, comme complice de son mari. Pourtant, même dans ce pays où les règles élémentaires des droits de l'homme sont bien souvent bafouées, il existe encore des espaces dans lesquels survit une petite flamme de justice. Ainsi, un avocat, Mohamed Ali Dadkhah, parvient en appel à faire libérer la femme du pasteur. Et pour Nadarkhani lui-même, il réussit à démonter, devant cette même cour d'appel, le principal argument de l'accusation consistant à dire que jusqu'à l'âge de 15 ans le pasteur était musulman, alors qu'il n'a, en réalité, jamais été un fidèle de l'islam.

Mais la République islamique et ses ayatollahs ne baissent pas les bras si facilement : les autorités religieuses font appel du jugement devant la troisième chambre de la Cour suprême de Qum. Le verdict rendu le 25 septembre dernier par cette instance est un modèle de casuistique et de mauvaise foi : certes, énonce-t-il, on ne peut reprocher à Youcef Nadarkhani d'avoir été musulman avant d'être chrétien, et sur ce point, nous acceptons les arguments de la défense. Mais ses parents étant musulmans, il était tenu de revenir à la religion de ses ancêtres. Il n'est donc pas coupable "d'apostasie simple, mais - audacieux néologisme - d'apostasie nationale". Et comme tel, il doit être condamné à mort, sauf si dans les trois jours il acceptait d'abjurer sa foi chrétienne. Les trois jours sont écoulés, et voilà pourquoi, pour sauver Youcef Nadarkhani d'une pendaison qui peut intervenir à tout moment, il est urgent que la communauté internationale se mobilise pour le pasteur iranien, comme viennent de le faire la France, par une déclaration du porte-parole du Quai d'Orsay, mais aussi et surtout David Cameron et Barack Obama. Il est vrai que ses conseillers ont fait valoir au président américain que, né lui-même d'une famille musulmane d'Indonésie, il pourrait, s'il était iranien, être accusé d'"apostasie nationale" !

Michel COLOMES

http://www.lepoint.fr/chroniqueurs-du-point/michel-colomes/iran-le-pasteur-qui-prefere-la-pendaison-au-reniement-01-10-2011-1379378_55.php
Tag(s) : #Société
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :