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Hercule Gbagbo-2

’Mais je résisterai. J’ai le cuir épais. Bédié s’est couché. Moi, je ne laisserai jamais Alassane Ouattara diriger la Côte d’Ivoire. S’il veut mon fauteuil, il faudra d’abord qu’il me passe sur le corps !’’. Ce propos de Laurent Gbagbo, selon Jeune Afrique du 18 décembre 2010, résume toute la psyché de l’homme. Car l’ex-président de la Côte d’Ivoire ne conçoit la vie qu’en termes de lutte, de résistance et de bataille : ‘’Les sondages ne font pas une élection, personne n’est propriétaire de ses voix. Rien n’est gagné d’avance, alors je me bats’’, confiait-il à François Soudan dans un autre numéro de Jeune Afrique, celui du 26 octobre 2010 déjà. Il rêvait alors d’une finale contre le président Bédié. Mais interrogé par le journaliste de ce qu’il pense d’une finale contre Alassane Ouattara, il répondit : ‘’Ce sera sans doute plus facile. Mais peu importe, pourvu que mon adversaire soit sorti des urnes’’. Cependant, pour le baroudeur qu’il est, M. Gbagbo salivait devant la perspective d’une âpre bataille électorale à Abidjan, d’où cette assertion dans l’édition du 27 novembre 2010 : ‘’Et Abidjan c’est le laboratoire de la Côte d’Ivoire de demain. C’est là que la bataille sera la plus intéressante à observer : ce sera une bataille pour les valeurs démocratiques, une bataille éthique’’. Et c’est précisément l’absence de tout esprit belliqueux chez le président Bédié qui constitue la différence entre lui et ce dernier : ‘’Moi, je ne conçois pas qu’un chef puisse, comme il l’a fait en décembre 1999, abandonner son pays et ne pas organiser la lutte contre l’agression’’. Plus loin, il soulignait encore sa vision de la chefferie : ‘’Un chef, ça se bat, ça résiste, quitte à y laisser la vie !’’. Ajoutez à tout cela la conclusion qu’il avait tirée à la fin de son passage catastrophique sur les plateaux de la RTI à l’avant-veille de l’élection du premier tour. À la question de savoir pourquoi les Ivoiriens devraient voter pour lui plutôt que pour un autre candidat, il répondait : ‘’… parce que je suis celui qui sait résister contre les bourrasques’’. Enfin, dans son face-à-face contre Alassane Ouattara le 25 novembre, il a prononcé cinq fois le mot ‘’lutte’’ : ‘’la lutte contre le chômage’’, ‘’la lutte contre la corruption’’, ‘’la lutte contre l’insécurité’’, ‘’la lutte contre le racket’’, etc.

Pour Laurent Gbagbo, le pouvoir, c’est une affaire du plus fort ; la seule aptitude exigée étant celle d’être bon lutteur . Mais quand comprendra-t-il donc qu’un président n’a pas besoin d’être un lion, roi de la jungle ? Il n’a pas besoin d’être le plus fort de son pays, ni besoin d’écraser tous ses adversaires pour prouver qu’il est le ‘’woody’’, c’est-à-dire le mâle dominant. Dans une société policée, la force ne fait pas droit ainsi que l’affirmait Jean-Jacques Rousseau dans son Contrat Social. Cette mauvaise appréciation des valeurs requises pour être chef fait que Laurent Gbagbo ne prononce jamais les mots essentiels comme développement, comme croissance économique, comme industrialisation, qualité de l’éducation nationale, amélioration du système de santé, assainissement de l’environnement, amélioration du niveau de vie, politique ambitieuse de l’emploi, balance commerciale excédentaire, surplus budgétaire, augmentation de l’espérance de vie, etc. Si son bilan est désastreux, c’est parce qu’il n’a rien compris à la fonction présidentielle : on ne lutte pas contre des notions abstraites – chômage, corruption, insécurité, racket et quoi encore ? - car on ne peut pas les voir. On mène une politique qui permet d’y trouver des solutions : une bonne politique de formation et d’éducation, une politique de l’emploi fondée sur la croissance économique, une politique de moralisation de la vie publique, une bonne politique sociale et d’éducation civique, une politique sanitaire et tout le reste. En termes simples, il s’agit de réfléchir – et non de se battre -, car la réflexion permet de dégager des propositions de solutions. Et quand on les a, on délègue des pouvoirs à ses collaborateurs et subalternes pour mettre en pratique cette politique, et on exige d’eux des résultats. C’est de cela qu’il s’agit, sinon l’on organiserait des compétitions de lutte à l’échelle nationale pour débusquer l’Okonkwo du pays tous les 5 ans, plutôt que d’organiser une élection présidentielle. Et l’Okonkwo resterait en place tant qu’il pouvait défaire tous ses challengers, jusqu’à ce qu’il soit terrassé par un autre lutteur.

Dire donc que Gbagbo n’a pas pu travailler ces dix dernières années parce qu’il en a été empêché est on ne peut plus puéril. Comme je l’ai dit plus haut, un président, ça arrête une politique et ça délègue son pouvoir à des collaborateurs et subalternes pour la mettre en pratique. Le président n’a pas à travailler de ses mains comme dans une plantation de cacao. Le travailleur manuel peut être empêché physiquement de travailler, un travailleur intellectuel comme le président de la République, non ! Il lui suffit d’avoir réfléchi à une politique ambitieuse et à la faire mettre en pratique par plus petits que lui, mais des gens compétents et honnêtes, travailleurs et ambitieux, pas des copains et coquins de moralité douteuse et foncièrement incompétents. Un président empêché de travailler ? Il est totalement incompétent et devrait, au nom de l’honneur, démissionner avant la fin de son mandat !

Tag(s) : #Libre opinion
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