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Mme-Coumba-Bah-Traore-1.jpgTitulaire d’un Master en Science et Technologie de l’Université de Cornell aux USA, Coumba Bah Traoré a plusieurs cordes à son arc, après des études au pays de l’Oncle Sam. Mariée et mère de quatre (4) enfants, elle est chargée de mission à l’ASAM-SA, assistante technique du directeur général adjoint de l’HUICOMA, coordinatrice, responsable marketing, formatrice de projet ABIS, financé par le Programme régional ouest africain Warp et Wid de l’USAID. Récemment, Mme Traoré est directrice générale de Bah- Consulting.

Voici donc une jeune femme qui a fait de hautes études, mais a accepté de vivre dans son pays sur le terrain car la zone de recherche est très étendue puisqu’elle couvre tout le Mali. Mme Coumba Bah Traoré compte parmi les femmes maliennes qui se partagent les responsabilités sociales avec la gent masculine. Il s’agit de femmes organisées et responsables excellant dans leurs professions, jusque-là réservées aux hommes.

Agée de 40 ans et en sa qualité de consultante- chercheure, elle assume plusieurs responsabilités dans des domaines très divers.

Une Malienne désormais consciente de sa responsabilité, de son rôle et de l’implication active qu’elle doit assumer pour le développement social, culturel, idéologique, politique, et économique de son pays. Une citoyenne qui a maintenant décidé et promet de ne plus demeurer en marge de la vie socio- politique de son pays.

L’Inter de Bamako : Pour quelles raisons avez- vous initié ce mouvement Génération malienne consciente (EMACO) ? Et quel but visez- vous?

Mme Coumba Bah Traoré : Depuis le début de la rébellion, le massacre d’Aguel Hok qui a suivi, avec son corollaire les événements des 21 et 22 mars, et maintenant la profonde crise multidimensionnelle et multiforme menaçant notre survie en tant que Nation, j’ai eu à traverser, comme à l’image du pays, plusieurs phases et gérer plusieurs crises personnelles, intra-personnelles.

D’abord, c’est en premier lieu un sentiment d’angoisse, de faiblesse, de désarroi total qui m’a animé. Après j’ai eu un sentiment de colère, colère surtout à l’endroit d’autrui, plus particulièrement des anciens dignitaires, les politiques des ces 20 dernières années soit disant démocratiques.

Ensuite, en un troisième temps, ça été une période d’autocritique, de colère interne, dirigée envers moi-même une fois que j’ai pu apprécier une partie de mes erreurs, des conséquences de mon inactivisme, de mon incivisme. Là, après cette autocritique, c’est donc ainsi que naturellement la rédemption a reconquis tous les autres sentiments antérieurs.

Dès lors que j’ai reconnu la part de mon erreur, ma part de responsabilité dans ce que nous vivons en tant que peuple, en tant que nation, en tant que famille, cela a été donc très facile de poser des actes de réparation. Pour moi, l’éveil collectif de la jeunesse, qui constitue le Mali d’aujourd’hui et celui de demain était primordial pour une sortie de crise. Et cet éveil, en mon entendement, était d’abord mental, individuel et en second lui social et collectif.

Une synergie au sein des associations et regroupements d’associations était une priorité. Pour moi, la jeunesse malienne devait s’atteler afin que 2+1 deviennent 5 ou plus, car ne dit-on pas que l’union fait la force ?

Or d’un côté, il y avait les pros, les contres, les neutres, le Conseil national de jeunes (CNJ), le CNJ dissident, l’Association des élèves de étudiants du Mali (AEEM) a deux tentacules et quoi  d’autre encore ?

Donc de rencontre sen rencontres, de forum en forum, j’ai commencé à tisser des liens de camaraderie, d’amitié et même fraternelles avec certains de mes braves frères et sœurs militants qui contrairement a ma personne, eux étaient beaucoup plus éveillés et conscients des enjeux.

Ainsi en un premier temps, nous avions échangé par rapport à l’organisation ne serait ce que d’une simple poignée de mains, ne serait ce que pour une seule minute entre les organisations antagonistes pour ne pas dire ennemies au sein de la jeunesse malienne. C’est ainsi dans la foulée de la mise en œuvre d’une telle initiative,  j’ai eu à échanger avec un ami et frère, dont je tairai le nom, un jeune avocat malien, que l’élaboration d’une charte fut évoquée.

Donc, en réalité, l’idée d’une Charte, symbolisant l’Espoir et l’Espérance d’une Génération malienne consciente (GEMACO) est celle d’un ami et frère- jeune avocat malien, moi, je n’ai été en fait que le catalyseur pour son élaboration, sa signature et maintenant la mise en œuvre.

Tout simplement, le but visé par GEMACO, c’est de célébrer l’union sacrée entre la jeunesse malienne de tout bord, tout en respectant et acceptant nos individualités. Nous sommes quatre vingt six (86) associations et regroupement d’association signataires recensés a ce jour, collaborons ensemble pour ainsi créer une synergie dans le cadre de la mise en œuvre de nos cinq (05) valeurs cardinales.

A savoir :

1) l’unité et intégrité territoriale ;

2) l’éveil des consciences et la constitution des Jeunes en acteurs légitimes ;

3) la valorisation de l’Education, la formation et l’accès a l’emploi ;

4) la solidarité nationale et internationale ;

5) la justice comme un droit pour tous.

L’Inter de Bamako : Pourquoi vous avez parrainé la marche de la Paix et de la Solidarité menée par M. Camara. Et pourquoi elle s’est arrêtée à Mopti le 22 septembre ?

Mme Coumba Bah Traoré : Le Flambeau de la Paix et de la Solidarité de Kayes à Kidal est une initiative de la GEMACO, un message fort lancé en l’endroit de nos frères et sœurs déplacés et vivant sous occupation dans le septentrion de notre pays. C’est dans le cadre de la mise en œuvre de notre charte, pour illustrer sur le terrain des actes concrets de solidarité et d’union sacrée que nous avons bien voulu mener cette marche, marathon à sa tête notre athlète international Mamadou Camara, qui est lui-même membre signataire de la GEMACO en tant que président de l’Association des jeunes expulsés.

Certes, très souvent la jeunesse malienne est labélisée à tort ou à raison d’être démunie et sans ambition, ni idéaux. Donc, cette marche était aussi une opportunité pour la jeunesse malienne de se faire valoir, tout d’abord en arrêtant de se sous estimée elle-même. De croire en elle, et se rappeler que là où il y a la volonté tout est possible.

Ainsi en 30 jours, du 22 août au 22 septembre, avec 03 jours de repos total, donc 27 jours de marche, avec plus de 1250 km, l’équipe du Flambeau de la Paix et de la Solidarité a sensibilisé toutes les populations sur le besoin pressant de solidarité, d’union sacrée, de compassion, et d’amour entre tous les frères et sœurs maliennes, les frères et sœurs d’une même grande famille, le MaliBA.

Pour Mamadou Camara et les signataires de GEMACO, aucun sacrifice n’est et ne sera de trop pour notre patrie, le Mali. Car pour GEMACO, après Dieu, c’est bien le MALI !

L’Inter de Bamako : Pourquoi le Flambeau s’est-il arrête à Sévaré ?

Mme Coumba Bah Traoré : D’abord, nous tenons à dire que ce n’est certainement pas par peur. Sûrement pas par mépris envers nos frères vivant sous occupation. Bien au contraire. Nous aimons nos frères des régions de Kidal, Gao et Tombouctou et avons quotidiennement et continuellement des pensées affectives et chaleureuses envers tous les Maliens déplacés et vivant sous occupation.

Cependant, nous étions d’abord butés à un problème de logistique. Le véhicule suivant l’équipe du Flambeau étant celui de Malitel et bandé à ses couleurs, ne pouvait plus continuer au delà de Sévaré. Il nous a été rapporté que depuis le début de la crise, plus de 03 véhicules de la Sotelma /Malitel avaient été déjà confisqués.

Aussi, vu le mellting pot au sein des groupes de bandits armés, narcotrafiquants, soit disant djihadistes il nous a été conseillé non seulement du côté de nos familles, des autorités et des amis de ne pas jeter l’huile sur le feu en prenant des risques qui pourront aggraver une situation déjà compliquée. C’est ainsi que le Flambeau fut réceptionné par le gouverneur de Mopti et remis aux commandements des armés, le 22 septembre 2012  dans le cadre des festivités commémorant notre 52ème anniversaire de l’accession à l’indépendance.

Le colonel-major, Aly Kounta Coulibaly, nous a ainsi assuré qu’inchAllah, au plus tard le 20 janvier 2013, nous aurions l’opportunité de parcourir librement toute l’étendue de notre territoire avec le message GEMACO, celui de la PAIX, de la cohésion et de l’amour inconditionnel entre tous les Maliens.

L’Inter de Bamako : Après 20 ans d’apprentissage démocratique, le Mali a basculé dans une crise sas précédent. A qui attribuez-vous cet échec?

Mme Coumba Bah Traoré : Comme j’ai eu à le dire en début de cet entretien. L’échec de notre démocratie, est avant tout individuel, et après collectif. Il est donc très important voire crucial que chacun puisse reconnaître sa part de responsabilité. Sans cela, un redressement sera une mission vaine.

Oui, certes, les degrés de responsabilités ne sont pas pareils, ni comparables. Les acteurs de la situation, les dirigeants et les responsables politiques sont peut être plus responsables que le citoyen lambda. Mais, pour des raisons d’efficience, et afin d’éviter toute récidive, chacun, Malien et Malienne, plus particulièrement les 20 ans et plus devront faire leur audit personnel.

Constater ses propres écarts par rapport aux exigences d’un pays démocratique, d’un peuple soucieux de son épanouissement socio- politique, et de sa croissance économique ? Qu’avons-nous  individuellement fait ? Qu’est- ce qui nous a manqué ?

Ce bilan individuel permettra ainsi à chacun un éveil de conscience. Un éveil pour la mise en œuvre d’actions correctives et préventives nécessaires pour un nouveau départ, départ d’abord individuel. Et après InchAllah, les efforts individuels convergés résulteront en une synergie qui propulsera et maintiendra un Mali nouveau, fier, fort, uni, laïc, véritablement démocratique, uni mais surtout INVINCIBLE !

L’Inter de Bamako : Quelle définition donnez-vous au mot «Paix» ?

Mme Coumba Bah Traoré : Pour moi, la Paix est un état d’âme. Personnel et interne. C’est la sérénité d’un état d’esprit d’abord !

L’Inter de Bamako : Pensez- vous que paix et tribalisme font bon ménage?

Mme Coumba Bah Traoré : Non. Le tribalisme, c’est avant tout un acte discriminatoire et ségrégationniste. Une vie très négative. Il est plus externe qu’interne en fait. La Paix ne pourra jamais faire bon ménage avec le tribalisme, mais le vaincra toujours et toujours !

L’Inter de Bamako : Quand il y a crise, ce sont les femmes qui souffrent. Quand il y a élection, elles sortent massivement pour faire gagner le futur candidat, mais rarement on fait confiance en elles pour les confier les postes à responsabilité. Qu’est-ce qui explique cette injustice?

Mme Coumba Bah Traoré : Je suis désolée mais en tant que femme, je ne vois pas exactement les choses de la sorte. C’est vrai que les questions de genre ne sont pas particulières a l’Afrique, ni au Mali. Partout dans le monde, les femmes ont été victimes et continuent à souffrir d’actes discriminatoires.

Mais pendant combien de temps allons- nous vraiment continuer à prendre et accepter ces excuses ? La femme s’est elle vraiment posée la question sur la cause des racines de sa souffrance ? En serait-elle l’actrice involontaire et inconsciente ? La souffrance de la femme en temps de crise, serait elle en premier lieu liée aux actes ou inactions de la femme elle-même ?

Dans les sociétés comme les nôtres, ou la femme est et demeure le pilier de la famille, la garante des valeurs et l’éducatrice principale voire unique des enfants, il sera grand temps que nous les femmes arrêtons de se confondre en excuses et en victimes. Si un changement sociétal est demandé et nécessaire, cela ne saurait ce faire sans un changement de comportement. Et qui dit changement comportemental parle d’un changement de longue haleine, voire générationnelle.

Alors, je dirais simplement, à mes sœurs maliennes au boulot ! Attelons- nous à remodeler toute suite et maintenant nos fils pour qu’ils fassent de meilleurs hommes pour demain, de meilleurs compagnons, des partenaires et concitoyens complémentaires à nos filles.

L’Inter de Bamako : Quelles solutions préconisez- vous pour que le Mali reconquière son intégrité territoriale?

Mme Coumba Bah Traoré : Le 1/3 qui reste du territoire non occupé, les Maliens du Sud, ceux de la diaspora doivent s’unir. Pas seulement en parole, mais vraiment l’UNION sacrée et taire toute les divergences, différences et politiques partisanes.

Pour l’Instant, le seul et unique objectif c’est le MALI, libre, reconquérir, nos 1.241.000 km2 avec tous les Maliens libres de leur mouvement et du choix de leur religion.

Tant que nous ne parlerons pas le même langage, nous n’aurions le respect, ni l’oreille, ni l’assistance de qui que ce soit. Ne dit- on pas «Aide toi, le ciel t’aidera» ce n’est donc surement pas dans la division, les discours vains, la floraison d’associations et de collectifs ici et là, que nous avancerons. Car la division ne fera que nous affaiblir d’avance. Elle nous affaiblira à nos propres eux, nos affaiblira aux yeux des autres sans compter ceux de l’ennemi.

Après l’union sacrée, le soutien a l’armée malienne, notre armée nationale, nos forces de sécurité et de défense est la condition sine qua non pour la libération et la reconquête du territoire dans son intégralité. Si je n’ai jamais entendu d’absurdités c’est bien à propos du soutien ou des pensées de certains à propos des capacités au non de notre armée. Si cela n’est pas encore clair dans les esprits des uns et des autres, il le faudrait et cela très vite d’ailleurs, car sans la confiance totale et le soutien de tous les Maliens à notre armée, la reconquête sera impossible. Nous pouvons avoir toutes les armées du monde, mais personne ne se battra, ni osera se sacrifier en première ligne. Oui a l’appui et au soutien, d’accord. Mais seulement et après nous mêmes, après nos braves et dignes et fiers soldats maliens !

Oui l’argumentaire, c’est pour d’autres aussi, mais le Mali a toujours fait la guerre dans les autres pays africains dans pareille situation. Encore oui, c’est vrai, mais là encore il faut être Malien pour le faire !

Réalisé par Amy SANOGO

Tag(s) : #Interview
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