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Depuis le 23 décembre 2008, date de la prise du pouvoir par la junte militaire au lendemain du décès du Général Lansana Conté, la quasi-totalité des partis politiques et des représentants de la Société Civile regroupés au sein des Forces Vives de Guinée organisées en forum, ont décidé d'accompagner le Conseil National pour la Démocratie et le Développement (CNDD)dans la conduite d'une transition consensuelle et apaisée en raison de son engagement à réaliser le programme suivant: 

- la récupération des créances de l'Etat

- la désarticulation et l'éradication des réseaux de trafic de drogue et de personnes

- la restructuration des forces de défense et de sécurité

- le retour à l'ordre constitutionnel à travers des élections crédibles et régulières auxquelles ni le Président ni aucun membre du CNDD et du Gouvernement ne serait candidat

 

C'est dans ce cadre qu'un chronogramme a été proposé par les Forces Vives et accepte par le Président du CNDD. Selon le consensus obtenu, les élections législatives et présidentielles devaient se dérouler respectivement en octobre et décembre 2009.

 

Mais l'absente manifeste de volonté politique de la part du CNDD l'a amené à retarder la prise de décisions importantes qui étaient nécessaires au respect des différentes étapes. Il  s'agit principalement :

- de la mise en place du Conseil "National de Transition (CNT) qui devait intervenir en mars 2009 et qui n'est pas réalisée à ce jour, soit plus de cinq mois de retard

- du déblocage de la quote-part de l'Etat soit quarante cinq (45)    milliards de Francs Guinéens (environ 9 millions US$) intervenu avec

A mois de retard.

 

De la formalisation de la décision de recensement des Guinéens de l'extérieur dans 18 pays, intervenue il y a à peine une semaine.

Ces différents manquements ont entraîné un retard important dans la réalisation des différentes séquences, ce qui a abouti à la création, sur proposition des Forces Vives, d'un comité ad hoc paritaire. Ce comité devait en cerner les causes en vue de proposer des mesures susceptibles de rattraper le retard par rapport au chronogramme initial. Au terme de 14 jours de travaux, ce comité est arrivé à des conclusions qui décalent simplement le jour du vote étant entendu que toutes les candidatures doivent être validées par la Cour Suprême en Décembre 2009. Ces conclusions ne modifient le premier chronogramme que sur deux points essentiels;

 

- l'inversion de l'ordre initial des élections

- le report des élections à l'année 2010 selon le calendrier suivant :

 

. 31 janvier 2010 : premier tour de l'élection présidentielle

. 14 février 2010 : second tour

. 26 mars 2010 : élections législatives

 

Le respect de ce chronogramme était assorti de conditions dont le non-respect pouvait conduire à d'autres retards importants avec le risque que les dates ci-dessus ne puissent à leur tour être respectées.

Déjà, il faut noter que, dans le cadre de ce chronogramme révisé, les délais de mise en place du CNT chargé du toilettage de la constitution et ceux du lancement des opérations d'enrôlement des Guinéens de l'extérieur sont largement dépassés. Tout ceci semble procéder d'une absence manifeste de volonté politique et présage de l'intention du CNDD de créer les conditions d'un autre report d'élections dans le but évident de retarder la fin de la transition.

Par ailleurs, la modification unilatérale par le Chef de l'Etat de l'effectif et de la composition du CNT qui est passé de 163 membres convenus à 244 a créé une situation de blocage qui constitue un facteur de retard du processus électoral et provoque une crise de confiance entre les Forces Vives et le CNDD.

 

Mais la raison fondamentale de la crise actuelle dont la manifestation la plus éloquente est l'enlisement du processus électoral et la rupture du dialogue entre les parties est l'intention manifeste du Capitaine Moussa Dadis Camara de se présenter à l'élection présidentielle prochaine en dépit des engagements solennels pris devant l'opinion nationale et la communauté internationale que ni lui ni un autre membre du CNDD et du Gouvernement ne se porterait candidat à ce scrutin.

En effet, les actes sont nombreux qui attestent de la ferme volonté du Chef de l'Etat de renier ses engagements. On peut citer entre autres :

 

- la monopolisation totale des médias d'état et l'interdiction d'accès des partis politiques aux radios et à la télévision publiques ;

- l'interdiction des débats et autres émissions politiques dans les médias privés même si cette mesure a été levée depuis, en raison de l'indignation générale qu'elle avait soulevée bau sein de l'opinion ;

La multiplication des groupes de soutien et l'intensification de la propagande en faveur de la candidature du Chef de l'Etat par la sortie massive de fonds publics et ce, en dépit de la précarité de la situation économique du pays, du non paiement des dettes intérieures de l'Etat et de l'engagement ferme du CNDD à appliquer rigoureusement les règles de bonne gouvernance, surtout en matière de dépenses publiques ;

- la militarisation à outrance de l'appareil de l'Etat, en particulier de l'administrai ion territoriale dont le rôle est prépondérant dans le processus électoral (gouverneur, préfets, sous-préfets...) ;

- le recrutement anarchique au sein des forces de défense alors que le Président semblait se préoccuper du caractère pléthorique de l'armée:

 

- la recrudescence des arrestations arbitraires et des détentions illégales en des lieux non conventionnels (îles de Loos)

D'autre part, l'intention affichée de substituer aux Forces Vives les représentants des collectivités décentralisées procède de cette volonté de marginalisation des partis politiques dans le débat politique et dans la gestion de la transition. Or, dans le droit guinéen. Les présidents des structures communales et communautaires n'ont aucune vocation à participer à l'élaboration du cadre juridique de la nation ou au choix des candidats aux élections nationales, rôle qui revient de droit et exclusivement aux partis politiques depuis la fondation de la République de Guinée.

 

La rupture totale du dialogue national et l'interdiction d'accès aux médias d'Etat et aux radios privées des différents courants d'opinion du pays ont amené des franges importantes de la population et en particulier les jeunes, à recourir, devant l'absence de perspectives à des manifestations pacifiques violemment réprimées par les forces de défense et de sécurité. D'ores et déjà on déplore une victime lors des premières confrontations entre les émeutiers et les forces de l'ordre. Ce qui laisse présager, dans l'avenir, des affrontements plus tragiques si l'enlisement du processus de transition était amené à se poursuivre.

 

Devant les périls qui menacent la paix et la stabilité de la Guinée, le Forum des Forces Vives de Guinée a demandé au Groupe International de Contact sur la Guinée, lors de sa 6eme réunion à Conakry, le 3 Septembre dernier, d'intervenir auprès du Chef de l'Etat et du CNDD afin que les dispositions ci-après, de nature à décrisper la situation politique et sociale, soient prises sans délai :

 

- la révision de l'ordonnance portant création du CNT afin de la rendre conforme aux accords entre le Chef de l'Etat et les Forces Vives, notamment sur sa composition et son effectif

- la mise en place immédiate de cette institution sur la base des accords spécifiés ci avant

- la levée de l'interdiction d'accès des partis politiques aux médias publics et des débats à caractère politique dans les médias privés

- la levée de l'interdiction des manifestations des partis politiques sur l'ensemble du territoire national à l'instar de la liberté de mouvement dont jouissent pleinement les groupes de soutien à la candidature du Chef de l'Etat ;

- la confirmation publique et formelle de son engagement selon lequel ni lui ni aucun membre du CNDD ou du Gouvernement ne serait candidat à la prochaine élection présidentielle. Cette confirmation est absolument nécessaire pour permettre à la Guinée d'évoluer dans la stabilité.

 

La réalisation de ers préalables aurait pu faciliter la reprise du dialogue et restaurer entre les Forces vives de la Nation et le CNDR la confiance sans laquelle aucune gestion consensuelle et apaisée de la transition n'est possible.

 

Malheureusement, lors de sa rencontre ù huis clos avec les membres du Groupe International de Contact, le Chef de l'Etat a confirmé la forte probabilité de sa candidature à l'élection présidentielle prochaine mettant ainsi un terme au doute qu'il laissait planer sur ses intentions. Devant ce qu'il a qualifié de "remise en cause des engagements antérieurs du CNDD qui contrevient au partenariat établi avec la communauté internationale", le Groupe de contact a décidé de procéder à des consultations en vue de prendre les décisions appropriées par rapport à cette nouvelle réalité.

 

Aujourd'hui, le dialogue est totalement interrompu entre le CNDD d'une part, les Forces Vives et la Communauté Internationale, de l'autre. La transition est donc dans l'impasse et le processus électoral dangereusement compromis.

Si la Guinée n'arrive pas à trouver les voies et moyens de relancer la transition sur des bases claires, la paix civile sera elle aussi irrémédiablement compromise. En plus, l'instabilité de la Guinée plongera fatalement l'ensemble de la sous-région ouest-africaine dans la désolation et l'instabilité.

 

L'ensemble des Forces politiques et sociales de la Guinée ainsi que la communauté internationale doivent anticiper sur ces événements et prendre leurs responsabilités avant qu'il ne soit trop tard. Tout en restant disponible pour la reprise du dialogue national sur des bases claires tenant compte des préalables évoqués ci-dessus, le Forum des Forces Vives de Guinée quant à lui est déterminé à assumer ses propres responsabilités, en mobilisant le Peuple de Guinée pour empêcher toute confiscation du pouvoir par le CNDD.

 

Le Forum des Forces Vives de Guinée

 

 

Tag(s) : #Communiqué
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