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Les États-Unis et l'Union européenne ont exigé le départ du président autoproclamé Moussa Dadis Camara, mis en cause après le massacre où l'armée est impliquée.

La Cour pénale de La Haye s'intéresse aux circonstances du massacre du 28 septembre, un coup dur pour les militaires.

 

Les mauvaises nouvelles s'accumulent pour les chefs de la junte guinéenne. Après les dures critiques émises à leur encontre lundi par la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest CEDEAO, les États-Unis et l'Union européenne ont exigé le départ du président autoproclamé, Moussa Dadis Camara.

À ces pressions s'est ajoutée jeudi la menace de poursuites devant la justice. La Cour pénale internationale (CPI) a annoncé l'ouverture d'une enquête préliminaire sur les tueries du 28 septembre dernier. Les services du procureur s'intéressent aux conditions de la répression ce jour-là d'une manifestation de l'opposition.

Les militaires et des policiers avaient ouvert le feu sur 50 000 contestataires, tuant, selon les ONG, au moins 157 personnes et en blessant plus de 1 000. Autant que le bain de sang lui-même, c'est la sauvagerie déployée par les soldats qui a choqué, même dans ce pays habitué aux exactions des hommes en uniforme. Les témoignages abondent sur les viols et les violences sexuelles quasi systématiques exercées contre les manifestantes.

Fatou Bensouda, procureur adjoint de la CPI, a affirmé que des femmes avaient ce jour-là été brutalisées par des hommes «apparemment en uniforme». «C'est révoltant, inacceptable, a-t-elle déclaré jeudi. Les responsables doivent rendre des comptes.» La veille, le commissaire européen chargé du développement et de l'aide humanitaire, Karel de Gucht, avait demandé l'ouverture de poursuites pour «crimes contre l'humanité».

Le capitaine Moussa Dadis Camara est le premier visé par ces accusations. Washington l'a directement mis en cause, et Bernard Kouchner a ouvertement fait part de ses «soupçons» sur l'implication de l'officier putschiste dans l'organisation du massacre. Le nom de certains proches de «Dadis», notamment son aide de camp le lieutenant Aboubacar Tomba Diakité, est également régulièrement cité.

Les investigations devraient certes prendre des mois, voire des années. Mais les crimes de guerre et contre l'humanité étant imprescriptibles, le temps joue pour les magistrats. Pour les chefs de la junte, les conséquences de cette sérieuse menace ne se sont pas fait attendre. Au sein du camp Alpha Yaya Diallo, une caserne de Conakry, cœur du nouveau pouvoir, les relations entre militaires se sont encore détériorées. Déjà, le 8 octobre, des coups de feu y avaient été entendus. Une partie de l'armée aurait alors tenté d'arrêter le lieutenant Diakité.

Sanctions éventuelles

Dans les jours prochains, de nouvelles pressions internationales risquent d'aggraver la fracture parmi les officiers. Vendredi, la CEDEAO doit se réunir pour prendre d'éventuelles sanctions économiques contre les putschistes.

Les chefs d'État africains, notamment le Sénégalais Abdoulaye Wade et le Nigérian Umaru Yar'Adua, pourraient également décider de l'envoi d'une force d'observation militaire à Conakry. L'arrivée des «casques blancs» réduirait fortement la marge de manœuvre des bérets rouges locaux.

«Les militaires guinéens se rendent bien compte que les coups de gueule du capitaine Camara et les dérapages de ses proches risquent de leur faire perdre le pouvoir. Certains sont tentés de forcer son départ pour sauver la junte. Mais ils craignent aussi qu'une lutte ouverte entre eux ne dégénère en affrontement armé», détaille un diplomate.

La perspective de la signature d'un fabuleux contrat avec une entreprise chinoise, qui pourrait injecter 7 milliards de dollars dans le pays, a bien un peu rompu l'isolement du pouvoir guinéen et lui a donné un bol d'air. Elle a aussi aiguisé les appétits. Pour l'heure, Moussa Dadis Camara, en guise de réponse, se mure dans le silence. Mais cette stratégie ne pourra pas durer très longtemps.

Tanguy Berthemet_lefigaro.fr

Tag(s) : #Politique
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